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mardi 21 mai 2019

Victimes des victimes…


Ils ne sont pas nombreux ceux qui, en Europe, connaissent les noms d’Alexandria Ocasio-Cortez, Ilhan Omar ou Rachida Tlaib. Il est urgent aujourd’hui de combler cette lacune. Parce que si, après une brève quarantaine, l’antisémitisme a survécu à la Shoah et s’est réinventé dans les langues de la droite radicale, de l’islam politique, de l’extrême-gauche et plus largement de la gauche, il pouvait néanmoins être contenu sinon étouffé tout le temps qu’il existait un anathème public implicite sur ses différentes expressions.

En Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, c’est surtout dans les partis dits progressistes, au Labour comme dans le Parti Démocrate, que cet anathème est, sous nos yeux, en train de voler en éclats.
En Grande-Bretagne d’abord, peu ignorent encore la contribution active du chef travailliste à la libération de la parole antisémite dans les rangs de son parti et au-delà. Le communiqué de solidarité avec les milliers de manifestants qui allaient peu après défiler en plein centre de Londres pour « commémorer » la « Nakba » avec force déploiement de banderoles dénonçant le prétendu contrôle juif des médias, affichant une symétrie entre étoile de David et croix gammée, déniant aux Juifs le droit à un Etat et promettant la destruction prochaine d’Israël, ou encore celles chargeant les Juifs de la responsabilité de l’antisémitisme qui les blesse, est la dernière illustration en date d’une obsession qui, en des temps pas si éloignés, aurait valu à son auteur une mort sociale immédiate et une fin de carrière politique certaine.


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Non plus aujourd’hui. Aujourd’hui, l’humeur est à ne pas s’en offusquer et, pour les médias, à plutôt diffuser un reportage sur les heurts récents à la frontière entre Gaza et Israël où, pour traduire les propos d’un adolescent qui déclare en arabe que « les chants révolutionnaires vous excitent et vous encouragent à couper la tête d’un Juif », la BBC choisit très consciemment de traduire le mot « yahud » par « israélien » plutôt que par « juif » de manière à occulter les racines essentiellement antisémites de la cause palestinienne. Evacuer, en somme, que ce signal de ralliement de tous les « progressismes » est le vecteur principal du nouvel antisémitisme.
Même aveuglement volontaire aux Etats-Unis où l’élection des trois nouvelles élues démocrates précédemment nommées à la Chambre des représentants a précipité une libération, jusque là impensable dans les travées du Congrès, de propos clairement révisionnistes et antisémites, sans que les cadres du parti ne s’estiment en devoir de les sanctionner, exigeant au contraire des Républicains qu’ils s’excusent d’avoir porté contre elles de telles accusations.
Ainsi en alla-t-il après la sortie d’Alexandria Ocasio-Cortez, élue de New-York, sur les prétendus massacres de Palestiniens par les Israéliens. Ainsi en alla-t-il aussi après les prières à Allah d’Ilhan Omar, représentante du Minnesota et membre de la puissante commission des affaires étrangères de la Chambre, pour éveiller le monde sur les pouvoirs diaboliques d’Israël, après ses propos sur l’argent des Juifs censé suborner les parlementaires américains en faveur d’Israël et après ceux sur la double allégeance supposée de ses collègues juifs du Congrès.
Et ainsi en a-t-il encore été après que Rachida Tlaib, représentante de l’Etat du Michigan élue elle aussi en novembre dernier, eut déclaré dans une interview à un site Yahoo que « penser à l’Holocauste lui inspirait un calm feeling« , soit un « sentiment de sérénité » au motif que ses « ancêtres palestiniens avaient tout sacrifié, biens, terres, dignité et certains jusqu’à leurs vies, pour donner aux Juifs rescapés de la Shoah un sanctuaire où ils seraient enfin à l’abri de leurs bourreaux ». En d’autres mots, la noblesse de ses aïeux dont elle se déclare la fière héritière, leur valut de devenir les victimes des victimes juives…
Et pourtant, là aussi, les Démocrates, loin d’exclure sur le champ leur collègue révisionniste de leurs rangs après lui avoir rappelé que ses ancêtres furent en réalité des adeptes et des auxiliaires des plus enthousiastes de la Solution finale, qu’ils firent au contraire tout pour empêcher les Juifs de rejoindre cette terre qui leur avait pourtant été promise et où ils auraient pu en grand nombre se mettre à l’abri des persécutions nazies, et que leurs fils forment aujourd’hui le dernier bastion non encore défait de la guerre des nazis contre les Juifs, les Démocrates, donc, ont, là encore, serré les rangs autour de l’auteur de telles inepties, préférant accuser les élus Républicains et, singulièrement, le Président le plus philosémite et le plus sensible aux raisons d’Israël de l’histoire américaine d’être, eux, les vrais responsables de la flambée antisémite dans le pays.
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Que, au Proche-Orient ou en Europe, il soit encore permis à ces héritiers du nazisme de revendiquer des droits sur une terre après que leurs pères aient offert d’y servir d’auxiliaires de son entreprise génocidaire déborde déjà largement les frontières de la décence la plus élémentaire. Mais que les murs honorables du Congrès américain résonnent aujourd’hui des échos de ce délire est le signe que, là aussi, les interdits antisémite ou révisionniste souffrent désormais d’exceptions réservées aux seuls inscrits à l’autoproclamé Camp du Bien.
Dans un précédent édito, j’écrivais de ce temps qu’il « est bien celui des ignorants et des imbéciles pour qui la dévotion à la cause palestinienne est le litmus test du progressisme contemporain, plus cher encore à son cœur que l’avortement, le mariage gay, l’abolition des frontières, le changement climatique ou les toilettes transgenres ».
J’oubliais qu’il est aussi, ce temps, celui des lâches qui détestent plus Donald Trump et les Républicains que celles et ceux de leur parti qui banalisent chaque jour un peu plus la parole antisémite dans l’espace public.
Comme l’écrivait Seth J. Frantzman dans le Jerusalem Post du 15 dernier, « This is America in 2019. Shame »
Isaac Franco, Chroniqueur à Radio Judaïca Bruxelles

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