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vendredi 19 avril 2019

La lettre politique de Laurent Joffrin...

Laurent Joffrin

Notre-Dame des polémiques

Il faut bien le dire : la controverse lancée par la droite et l’extrême droite françaises sur la flèche de Notre-Dame a été indûment montée en épingle. En pointe dans cette affaire, le Figaro, François-Xavier Bellamy, tête de liste LR ou encore Marine Le Pen, usent d’un argument absurde : au nom de la tradition, il ne faut pas toucher à une pierre, une statue, un vitrail ou une gargouille de Notre-Dame. Alors que la même tradition des cathédrales a consisté, dès l’origine, à faire évoluer sans cesse ces bâtiments en fonction des nécessités de l’heure, du progrès des techniques et du goût de l’époque. La cathédrale du Moyen Age n’était pas celle de Louis XIV, qui n’était pas celle de Victor Hugo, qui n’était pas non plus celle de Viollet-le-Duc. Conservatisme à front bas et frénésie immobiliste. Aussi bien, il n’est pas certain que la création d’une nouvelle flèche, malgré le concours lancé auprès des architectes, s’impose in fine. Comme le dit Maryvonne de Saint-Pulgent, bonne connaisseuse de ces questions, il est fort possible que la reconstruction à l’identique l’emporte, non par conservatisme, mais pour de simples raisons de budget, de délai et de commodité technique. La France par ailleurs signé une charte, celle de Venise, qui protège les bâtiments historiques et va dans le sens de la restauration pure et simple. Ainsi anciens et modernes, arc-boutés sur leurs convictions, seraient renvoyés dos à dos.
De même la polémique sur l’argent collecté a quelque chose d’artificiel. Certes les milliardaires qui s’achètent par leur libéralité une notoriété favorable pourraient aussi consacrer des efforts comparables à soulager les misères humaines. Mais s’ils n’avaient rien fait, on ne les aurait sans doute pas critiqués. En ces temps d’impécuniosité patrimoniale, leur argent est malgré tout bien venu : c’est le point essentiel. Quant à opposer l’argent consacré à la culture et celui qu’on dépense contre la pauvreté, c’est opposer l’art au social. Drôle d’idée. Très souvent, ceux qui demandent une augmentation des dépenses sociales sont les mêmes qui exigent un accroissement du budget de la culture. L’humanité ne vivant pas que de pain, elle consent, mais en période de manque, à dépenser pour l’art. Faudrait-il y mettre fin ?
LAURENT JOFFRIN

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