Elle est toujours où on ne l'attend pas : cette fois-ci, chez Philippe Garrel, dans Un été brûlant, elle est plus que jamais éblouissante de sensualité. L'actrice, nouvelle égérie de la collection cachemire d'Éric Bompard, revient sur son parcours et se livre sans fards.
C'est une beauté nomade qui passe avec aisance d’Irréversible, de Gaspar Noé, aux Matrix, des Wachowski). La voici, inattendue, dans Un été brûlant(1), de Philippe Garrel (en compétition à la Mostra de Venise), en actrice renommée, mariée à Louis Garrel, dans le rôle d’un jeune peintre. Évidemment, ils se déchirent sous les yeux d’un couple de figurants (Céline Sallette et Jérôme Robart) invité dans leur appartement romain. Le film est pavé des motifs habituels du cinéaste : vicissitudes de la vie à deux, obsession de l’art, tentations de la révolution, et Monica Bellucci s’y offre entre autres une époustouflante scène de danse. L’actrice, qui tutoie et caresse chaque mot de son accent transalpin, évoque son dernier film, ses deux filles (Deva et Léonie) et son rôle de nouvelle égérie cachemire d’Éric Bompard.
Madame Figaro. Comment avez-vous croisé la route de Philippe Garrel ?
C'est une beauté nomade qui passe avec aisance d’Irréversible, de Gaspar Noé, aux Matrix, des Wachowski). La voici, inattendue, dans Un été brûlant(1), de Philippe Garrel (en compétition à la Mostra de Venise), en actrice renommée, mariée à Louis Garrel, dans le rôle d’un jeune peintre. Évidemment, ils se déchirent sous les yeux d’un couple de figurants (Céline Sallette et Jérôme Robart) invité dans leur appartement romain. Le film est pavé des motifs habituels du cinéaste : vicissitudes de la vie à deux, obsession de l’art, tentations de la révolution, et Monica Bellucci s’y offre entre autres une époustouflante scène de danse. L’actrice, qui tutoie et caresse chaque mot de son accent transalpin, évoque son dernier film, ses deux filles (Deva et Léonie) et son rôle de nouvelle égérie cachemire d’Éric Bompard.
Madame Figaro. Comment avez-vous croisé la route de Philippe Garrel ?
Monica Bellucci. Le plus simplement du monde. Mon agent m’a dit qu’il souhaitait me rencontrer. J’ignorais d’ailleurs pourquoi. Nous avons fait des lectures. Philippe voulait tourner en mars. Mais j’étais enceinte de ma deuxième fille. Je pensais qu’il allait prendre une autre actrice. Il a préféré attendre et je l’en remercie.
À la lecture du scénario, qu’avez-vous pensé d’Angèle ?
Je ne regarde jamais mon personnage. La confrontation des deux couples, en revanche, me plaisait. Angèle et Frédéric ont tout : la beauté, l’argent, le succès. Ils ressemblent à des anges noirs, sensuels et dangereux. Mais leur incapacité à aimer les rend malheureux. Paul et Élisabeth, au contraire, n’ont que leur amour pour seule richesse. Mais ils parviennent à rendre cet amour tangible puisqu’ils conçoivent un enfant.
À la lecture du scénario, qu’avez-vous pensé d’Angèle ?
Je ne regarde jamais mon personnage. La confrontation des deux couples, en revanche, me plaisait. Angèle et Frédéric ont tout : la beauté, l’argent, le succès. Ils ressemblent à des anges noirs, sensuels et dangereux. Mais leur incapacité à aimer les rend malheureux. Paul et Élisabeth, au contraire, n’ont que leur amour pour seule richesse. Mais ils parviennent à rendre cet amour tangible puisqu’ils conçoivent un enfant.
"L’entente dans un couple n’a rien à voir avec le travail"
Étiez-vous familière de l’oeuvre de Garrel ?
Je connais ses films de jeunesse et j’adore le Vent de la nuit. Philippe, réalisateur radical, a une personnalité bien à lui. Il est à prendre ou à laisser.
Que diriez-vous de sa méthode de travail ?
On répète beaucoup en amont. Du coup, les liens entre les acteurs se nouent avant le tournage. Philippe éprouve un véritable amour pour ses acteurs et prend un réel plaisir à les diriger. Ce n’est pas si fréquent. On ne trouve pas toujours des metteurs en scène qui vous dirigent réellement. J’ai accepté la scène de nu du début alors que j’avais accouché deux mois plus tôt. Un abandon qui réclame de la confiance. Le film s’est situé dans un moment très particulier de ma vie : j’avais un bébé sur le plateau que j’allaitais.
Louis, le fils de Philippe, incarne Frédéric...
C’est émouvant d’être témoin de leurs rapports père-fils, réalisateur-acteur, constitués d’amour et d’estime réciproques. J’ai beaucoup aimé travailler avec eux.
Je connais ses films de jeunesse et j’adore le Vent de la nuit. Philippe, réalisateur radical, a une personnalité bien à lui. Il est à prendre ou à laisser.
Que diriez-vous de sa méthode de travail ?
On répète beaucoup en amont. Du coup, les liens entre les acteurs se nouent avant le tournage. Philippe éprouve un véritable amour pour ses acteurs et prend un réel plaisir à les diriger. Ce n’est pas si fréquent. On ne trouve pas toujours des metteurs en scène qui vous dirigent réellement. J’ai accepté la scène de nu du début alors que j’avais accouché deux mois plus tôt. Un abandon qui réclame de la confiance. Le film s’est situé dans un moment très particulier de ma vie : j’avais un bébé sur le plateau que j’allaitais.
Louis, le fils de Philippe, incarne Frédéric...
C’est émouvant d’être témoin de leurs rapports père-fils, réalisateur-acteur, constitués d’amour et d’estime réciproques. J’ai beaucoup aimé travailler avec eux.
Le film fait parfois songer au Mépris...
Je ne l’ai pas ressenti. Ce que j’ai ressenti, c’est que je tournais un film français. Les réalisateurs français ont une particularité : ils privilégient souvent les non-dits.
Garrel y rend aussi hommage à Cinecittà...
Magique. Nous tournions au mois de juillet. Il n’y avait personne dans les rues. Et je représentais l’Italienne, l’Église, le péché. Angèle n’est pas méchante, mais le pouvoir et la notoriété font qu’elle le devient. Elle pense que l’amour devient total lorsqu’on la regarde sans ne plus rien voir d’autre qu’elle. Elle veut être aimée comme les enfants ou comme les comédiennes... (Elle sourit.)
Je ne l’ai pas ressenti. Ce que j’ai ressenti, c’est que je tournais un film français. Les réalisateurs français ont une particularité : ils privilégient souvent les non-dits.
Garrel y rend aussi hommage à Cinecittà...
Magique. Nous tournions au mois de juillet. Il n’y avait personne dans les rues. Et je représentais l’Italienne, l’Église, le péché. Angèle n’est pas méchante, mais le pouvoir et la notoriété font qu’elle le devient. Elle pense que l’amour devient total lorsqu’on la regarde sans ne plus rien voir d’autre qu’elle. Elle veut être aimée comme les enfants ou comme les comédiennes... (Elle sourit.)
Dans le film, les protagonistes sont artistes. Des artistes peuvent-ils maintenir une entente conjugale ?
Oui, évidemment, puisque l’entente dans un couple n’a rien à voir avec le travail. (Elle rit.) Avec l’homme qui partage ma vie, nous n’évoquons jamais notre métier à la maison, nous préférons de loin parler de l’existence et de nos enfants. Je n’ai vu Black Swan, de Darren Aronofsky, que hier faute de temps. C’est vous dire...
Quelles ont été les principales étapes de votre carrière ?
L’Appartement, de Gilles Mimouni, mon premier long-métrage français. J’y ai rencontré des amis et l’homme de ma vie, du moins pour le moment. (Elle rit.)Suspicion, de Stephen Hopkins, mon premier film hollywoodien, le premier aussi à aller au Festival de Cannes. Malèna, de Giuseppe Tornatore, écrit pour moi et internationalement visible, ce qui n’est pas le cas de tous les longs-métrages italiens. Mais aussiIrréversible, de Gaspar Noé.
Oui, évidemment, puisque l’entente dans un couple n’a rien à voir avec le travail. (Elle rit.) Avec l’homme qui partage ma vie, nous n’évoquons jamais notre métier à la maison, nous préférons de loin parler de l’existence et de nos enfants. Je n’ai vu Black Swan, de Darren Aronofsky, que hier faute de temps. C’est vous dire...
Quelles ont été les principales étapes de votre carrière ?
L’Appartement, de Gilles Mimouni, mon premier long-métrage français. J’y ai rencontré des amis et l’homme de ma vie, du moins pour le moment. (Elle rit.)Suspicion, de Stephen Hopkins, mon premier film hollywoodien, le premier aussi à aller au Festival de Cannes. Malèna, de Giuseppe Tornatore, écrit pour moi et internationalement visible, ce qui n’est pas le cas de tous les longs-métrages italiens. Mais aussiIrréversible, de Gaspar Noé.
"Je n’ai pas d’autre appartenance que ma famille"
Pourquoi avez-vous choisi d’avoir des enfants tard ?
Je n’étais pas prête. Je le dis souvent, je suis lente... mon côté italien sans doute. Je mets du temps à comprendre où je vais, ce que je veux, à me connaître et à m’ouvrir, y compris à moi-même. Je voyais la maternité comme une responsabilité. Il faut être capable de refuser des projets pour rester avec ses enfants. Aujourd’hui, je dis non sans aucun problème et sans avoir le sentiment d’un sacrifice.
Dior vous a proposé le rôle d’égérie de sa marque à la quarantaine. Aujourd’hui, vous voilà tête d’affiche pour Éric Bompard et son vestiaire cachemire...
Je trouvais assez étonnant que l’on me demande de représenter la beauté d’une femme à cet âge-là. On vient d’avoir un enfant, on n’a pas dormi de la nuit, mais tout le monde prend soin de vous. On vous rend jolie. On vous maquille et on vous fait les ongles. Maintenant, cette beauté biologique va bientôt s’en aller. Ça n’a rien d’une
malédiction. Une autre beauté viendra peut-être, qui sera le fruit de ce que vous avez construit et de ce que vous êtes. L’autre jour, j’ai rencontré Anouk Aimée dans un avion : sublime. Une classe intacte. Je lui ai dit qu’elle avait joué dans deux de mes Fellini préférés.
Vous auriez pu être une héroïne fellinienne...
J’aurais adoré. Fellini, ce rêveur et ce très grand artiste, a signé des films assez classiques comme la Strada et d’autres très oniriques comme Huit et demi. Mais ce qui me touche, ce sont ses rapports avec Giulietta Massina, tellement petite, délicate, fragile...
Je n’étais pas prête. Je le dis souvent, je suis lente... mon côté italien sans doute. Je mets du temps à comprendre où je vais, ce que je veux, à me connaître et à m’ouvrir, y compris à moi-même. Je voyais la maternité comme une responsabilité. Il faut être capable de refuser des projets pour rester avec ses enfants. Aujourd’hui, je dis non sans aucun problème et sans avoir le sentiment d’un sacrifice.
Dior vous a proposé le rôle d’égérie de sa marque à la quarantaine. Aujourd’hui, vous voilà tête d’affiche pour Éric Bompard et son vestiaire cachemire...
Je trouvais assez étonnant que l’on me demande de représenter la beauté d’une femme à cet âge-là. On vient d’avoir un enfant, on n’a pas dormi de la nuit, mais tout le monde prend soin de vous. On vous rend jolie. On vous maquille et on vous fait les ongles. Maintenant, cette beauté biologique va bientôt s’en aller. Ça n’a rien d’une
malédiction. Une autre beauté viendra peut-être, qui sera le fruit de ce que vous avez construit et de ce que vous êtes. L’autre jour, j’ai rencontré Anouk Aimée dans un avion : sublime. Une classe intacte. Je lui ai dit qu’elle avait joué dans deux de mes Fellini préférés.
Vous auriez pu être une héroïne fellinienne...
J’aurais adoré. Fellini, ce rêveur et ce très grand artiste, a signé des films assez classiques comme la Strada et d’autres très oniriques comme Huit et demi. Mais ce qui me touche, ce sont ses rapports avec Giulietta Massina, tellement petite, délicate, fragile...
Vous avez souvent joué avec Vincent Cassel...
Ça rend les faux-semblants impossibles. On se connaît bien. On ne peut pas se mentir. Si je me montre fainéante au lieu de me donner à fond, il le voit.
Comment trouvez-vous votre équilibre entre Paris, Rome, les États-Unis ?
Et Londres ! J’ai toujours vécu de cette façon. Je suis une âme instable. J’ai besoin de bouger, peut-être parce que je viens d’une province italienne. Lorsque j’y habitais, une partie de moi se sentait rassurée, l’autre étouffait sans doute. Je me sens libre. Je n’ai pas d’autre appartenance que ma famille. Une famille italienne au sens large que je vois beaucoup. J’accouche toujours en Italie. Pourquoi ? Je l’ignore.
Et le Brésil ?
Vincent me l’a fait connaître lorsque nous étions tous les deux très jeunes. J’aime le Brésil sauvage. Lui il aime tout du pays. C’est comme une seconde peau pour lui.
Quels sont vos projets ?
Je viens de terminer à Istanbul Rhinos Season, de Bahman Ghobadi, l’auteur des Chats persans. Une histoire d’amour qui se déroule avant et après la révolution iranienne. Bahman me donnait l’impression de travailler avec un néoréaliste de l’après-guerre italienne. Et puis je tournerai un film avec Vincent. Une autre histoire d’amour, de Kim Chapiron cette fois.
L’occasion de vous retrouver ?
Le quotidien ne fait pas partie de notre vie mais c’est comme ça depuis toujours.
Ça rend les faux-semblants impossibles. On se connaît bien. On ne peut pas se mentir. Si je me montre fainéante au lieu de me donner à fond, il le voit.
Comment trouvez-vous votre équilibre entre Paris, Rome, les États-Unis ?
Et Londres ! J’ai toujours vécu de cette façon. Je suis une âme instable. J’ai besoin de bouger, peut-être parce que je viens d’une province italienne. Lorsque j’y habitais, une partie de moi se sentait rassurée, l’autre étouffait sans doute. Je me sens libre. Je n’ai pas d’autre appartenance que ma famille. Une famille italienne au sens large que je vois beaucoup. J’accouche toujours en Italie. Pourquoi ? Je l’ignore.
Et le Brésil ?
Vincent me l’a fait connaître lorsque nous étions tous les deux très jeunes. J’aime le Brésil sauvage. Lui il aime tout du pays. C’est comme une seconde peau pour lui.
Quels sont vos projets ?
Je viens de terminer à Istanbul Rhinos Season, de Bahman Ghobadi, l’auteur des Chats persans. Une histoire d’amour qui se déroule avant et après la révolution iranienne. Bahman me donnait l’impression de travailler avec un néoréaliste de l’après-guerre italienne. Et puis je tournerai un film avec Vincent. Une autre histoire d’amour, de Kim Chapiron cette fois.
L’occasion de vous retrouver ?
Le quotidien ne fait pas partie de notre vie mais c’est comme ça depuis toujours.
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