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mercredi 3 avril 2019

Une nouvelle communauté entièrement adaptée aux handicapés, la première d’Israël...


OFAKIM, Israël (JTA) — Les yeux d’Ayala parcouraient l’écran, à la recherche de mots et d’images pour répondre aux questions de son institutrice.
Âgée de 11 ans, l’élève souffre d’un trouble cognitif qui l’empêche de parler. Mais elle parvient à communiquer grâce à un écran capable de lire les mouvements de ses yeux et de retranscrire ses réponses.
« As-tu besoin d’aller aux toilettes ? Dis oui ou non, » lui indique son enseignante, Rivka Dimant, alors que le regard d’Ayala se pose sur la réponse « non. »
« Non ? Tu veux les montrer à ta famille ? Oui. Qui est-ce ? Maman et papa ! Où est la merveilleuse Ayala ? Montre-nous. Elle est là !  »
Dans de nombreuses écoles d’Israël, Ayala serait considérée comme un cas à part. Ici, elle fait partie des plus de 100 élèves d’une école dédiée, dans un lieu consacré aux personnes atteintes de handicap. Aleh Negev-Nahalat Eran, où l’école est située, est le seul campus créé pour les Israéliens souffrant de handicap sévère.
Aleh Negev fait déjà figure d’institution inclusive puisqu’elle tente de mettre en relation des patients extérieurs qui viennent sur le campus pour rééducation et ses résidents atteints de handicaps lourds. Il s’agit maintenant de porter le concept au stade supérieur : en octobre, Aleh Negev a reçu des subventions du gouvernement pour construire une ville adjacente qui sera intégralement adaptée aux handicapés, où ils habiteront et travailleront aux côtés de personnes valides..
« Ce village n’est pas un institut ; il s’agit d’un centre social communautaire, » a fait savoir Doron Almog, un général israélien à la retraite qui préside Aleh Negev, en référence au campus existant. « Il s’agit d’un concept d’intégration révolutionnaire pour les enfants et adultes souffrant des handicaps les plus sévères sur Terre. Il s’agit du test suprême d’humanité. »
La ville adjacente prévue, appelée Daniel, placera l’inclusion du handicap en son cœur. Elle sera bâtie à la fois pour les professionnels employés à Aleh Negev — actuellement au nombre de 340 — ainsi que pour les personnes souffrant de handicap bénéficiant de ses services et autres. Elle sera en contraste absolu avec les villes du pays qui sont parfois peu adaptées à ces personnes — des trottoirs sans rampes aux abris anti-bombe ne pouvant pas accueillir de fauteuil roulant.
À Daniel, dont la construction doit s’achever en 2024, les entrées seront plus larges, les trottoirs seront équipés de rampes et les maisons seront équipées de comptoirs et éviers plus bas. Ses 500 habitations comprendront également des meubles ajustables — comme des tables pourvues de plateaux qu’une personne en fauteuil roulant pourra placer au-dessus de ses jambes, ou, pour donner un exemple juif, une arche sainte dotées d’étagères coulissantes, pour un accès plus facile aux rouleaux.
« Afin d’attirer un personnel de qualité — médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, administrateurs — il faut créer une communauté, » explique Doron Almog. « Les gens ne viendront pas s’ils ne ressentent pas d’appartenance à quelque chose qui se respecte. »
Israël dans son ensemble commence à inclure les handicapés dans tous les aspects de la vie, d’après Avital Sandler-Loeff, la directrice d’Israel Unlimited, un projet d’inclusion du handicap de l’organisation humanitaire American Jewish Joint Distribution Committee (JDC). Son association pilote un programme qui a permis à 300 personnes souffrant de handicap d’emménager dans leur nouvel appartement adapté dans 37 villes du pays. Ils bénéficient d’une assistance à domicile, ainsi que d’aide pour trouver un emploi et s’acclimater à la communauté.
En plus de créer un meilleur environnement pour ses bénéficiaires, le programme est efficace sur le plan financier, estime Avital Sandler-Loeff. Si les gens vivent et travaillent dans une communauté, les institutions n’auront plus à leur verser d’allocations.
« Une vie indépendante signifie recevoir l’aide nécessaire à la vie qu’on souhaite mener, » explique-t-elle. « Une fois que quelqu’un est inclus dans la communauté, ils ont moins besoin d’assistance. S’ils travaillent, ils n’ont pas besoin d’aide dans la journée. S’ils se font des amis, pas besoin de payer pour intégrer un club particulier. »
Les officiers de police du commissariat de Leb Habira de Jérusalem aident les jeunes résidents d’ALEH à participer au marathon de Jérusalem avec leur déambulateur (Crédit : Autorisation ALEH Jérusalem)
Aleh Negev a pour ambition de servir de fondation pour l’inclusion du handicap à Daniel. Son campus de 100 000 mètres-carrés installé dans le désert du Néguev accueille 145 résidents atteints de handicap sévère et dispense des soins de rééducation à 4 500 autres patients ambulatoires. Il comprend une piscine thérapeutique, des étables à chevaux, un amphithéâtre extérieur et une ferme pédagogique. Il dispose également de cabinets médicaux et dentaires adaptés.
Il fait partie des quatre antennes d’Aleh, un réseau d’enfants israéliens souffrant de handicap sévère, et constitue le seul campus du genre. Aleh Negev bénéficie de subventions du gouvernement israélien et du Jewish National Fund.
Sa construction, entamée en 2003, a été chapeautée par Almog, un ancien général du Commandement du Sud. Son fils Eran souffrait d’autisme sévère et de troubles du développement. Il est décédé en 2007 à l’âge de 23 ans. Almog s’est impliqué dans Aleh lorsqu’il s’est rendu compte que les établissements et infrastructures dédiés aux personnes handicapées étaient déprimants et irrespectueux à l’égard de leurs patients.
Doron Almog (Crédit : Aleh)
« Ce fils, qui n’a jamais dit un mot, dans son silence assourdissant m’a dit : ‘Mon cher père, vous êtes tous des menteurs,' » a confié Doron Almog au JTA, pour décrire ce qui l’a poussé à s’investir dans Aleh.
Il a imaginé son fils lui dire : « Vous dites que tout Israël est responsable les uns des autres, mais vous ne le pensez pas. Pas pour moi, pas pour les plus faibles et les plus purs. »
Les résidents, les patients ambulatoires et les autres d’Aleh Negev interagissent toute la journée et se rassemblent pour des concerts, des carnavals et d’autres événements. Il y a également une école maternelle pour les enfants non handicapés du campus où ils côtoient des élèves handicapés.
La porte-parole d’Aleh Negev, Ravit Raz, indique que les parents hésitaient à inscrire leurs enfants non handicapés dans cette école par peur des enfants handicapés. Mais dès qu’ils ont vu les bénéfices de l’inclusion, les classes se sont vite remplies.
« Au début, ça ne plaisait pas du tout aux parents, » dit-elle, se rappelant ce qu’ils lui disaient, « comment osez-vous inviter mon enfant à étudier dans une institution aux côtés d’enfants avec des difficultés d’apprentissage ? » Aujourd’hui, un jour après les inscriptions, la classe est pleine. »

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